Le somnambulisme, que l’on peut diviser en trois catégories
1° Le somnambule naturel sera bien rarement un bon magnétiseur. Il peut n’être accessible ni à l’inspiration ni au fluide forcé et concentré sur un seul point par la volonté de celui-ci. D’autres fois, son état annonce une prédisposition favorable à recevoir une impulsion.
Le somnambulisme naturel est le rêve mis en action. La pensée suit son cours pendant le sommeil des organes. C’est encore là ce qui prouve que quelque chose vit en nous, en dehors de la matière, que nous pensons et que nous vivons pendant le sommeil, de la vie active de l’Esprit, bien que nous ayons pour un temps toutes les apparences de l’anéantissement.
La vie active se continue donc chez le somnambule ; seulement elle change de forme et prend celle d’un rêve. L’Esprit agite la matière, puisque les organes physiques sont remis en action par une force énergique dont au réveil l’individu a perdu jusqu’au souvenir.
L’inspiré véritable étant imprégné d’une force puissante et inconnue, a quelque chose du somnambule naturel en ce sens qu’il obéit à une impulsion qui lui est étrangère, et qu’il cesse de la ressentir aussitôt qu’il est rentré dans son état naturel.
Le somnambule agit sous la simple inspiration qui émane de lui ; il est concentré sur un seul objet, c’est pourquoi dans tous les actes qu’il accomplit alors, il paraît bien supérieur à lui-même. Si on l’éveille, il se trouble, il s’écrie comme au milieu d’un cauchemar et cette brusque transition n’est pas sans danger pour lui. Cet état bizarre n’attaque ni ne fatigue les organes. Ces êtres se portent très bien, parce que, tandis qu’ils agissent, l’être physique dort, se repose pendant que l’imagination seule travaille.
2° Chez l’inspiré, on peut dire qu’il y a toujours une grande somme de repos physique. Empreint d’une autre individualité, son corps ne participe pas à l’action qu’il accomplit, et son Esprit même sommeille d’une certaine façon, puisqu’on vient le forcer à s’assimiler les pensées d’un autre dont il perd ensuite jusqu’à la plus légère trace, à mesure qu’il s’éveille à la vie ordinaire.
Chez les natures dociles (et tous les somnambules ne le sont pas), ce travail de concentration, d’emparement de l’être, se fait sans lutte, c’est pourquoi ces pensées leur sont plus particulièrement données, précisément parce qu’elles n’interrompent pas le repos chez ceux à qui on les apporte.
On confond parfois les somnambules avec les inspirés, parce qu’il y a ressemblance dans les résultats.
Les uns et les autres prescrivent des remèdes. Mais l’inspiré seul est un révélateur ; c’est en lui-même que le progrès réside, puisque seul il est l’écho, l’instrument passif d’un Esprit autre que le sien, et plus avancé.
Le magnétisme réveille chez le somnambule, surexcite et développe l’instinct que la nature a donné à tous les êtres pour leur guérison, et que la civilisation incomplète au milieu de laquelle nous nous débattons, a étouffé en nous pour le remplacer par les fausses lueurs de la science.
Les inspirés n’ont nullement besoin du secours du fluide magnétique. Ils vivent paisibles, ne pensant à rien. Tout à coup un mot, obscur et indistinct tout d’abord, est murmuré à leur oreille ; ce mot les pénètre ; il prend un sens, grandit, s’élargit, devient une pensée ; d’autres se groupent à l’entour, puis l’élaboration intime étant arrivée à maturité, une force irrésistible les dompte, et, soit par la parole, soit par l’écriture, il faut qu’ils chassent au dehors la vérité qui les obsède.
Ils sont tellement imprégnés de leur objet, tellement possédés par lui, que, pendant ces heures d’élaboration ou de diversion, ils ne sont plus accessibles aux souffrances du corps, puisqu’ils ne le sentent plus et qu’ils n’ont plus conscience d’eux-mêmes, puisque, enfin, un autre vit en eux à leur place.
Peu à peu, à mesure que le souffle inspirateur les abandonne, la douleur revient ; ils reprennent possession d’eux-mêmes, ils vivent de leur volonté propre, subordonnée à leurs perceptions personnelles, et il ne reste plus, de l’apparition évanouie, rien qu’une sorte de vide dans le cerveau, suivant l’expression consacrée, mais vide qui existe en réalité dans l’organisme tout entier.
Souvent l’inspiré se trouve inconsciemment imprégné depuis longtemps de l’Esprit d’autrui. Il a, à son insu, des instants de recueillement forcé ; il sait et peut mieux concentrer des idées, tout en paraissant vivre de la vie commune et échanger avec les autres ses pensées ordinaires. Mais ses distractions sont plus fréquentes, même sans que son Esprit soit encore concentré sur une chose plutôt que sur une autre. Il flotte dans le vague ; il se laisse bercer par une sorte d’engourdissement qui est le commencement de l’infusion de communications encore au premier travail de transmission.
Par lui-même, le magnétisme ne donne pas l’inspiration : tout au plus la provoque-t-il, la rend-il plus facile. Le fluide est comme un aimant qui attire les morts bien-aimés vers ceux qui restent. Il se dégage abondamment des inspirés et va éveiller l’attention des êtres partis les premiers et qui leur sont similaires. Ceux-ci, de leur côté, épurés et éclairés par une vie plus complète et meilleure, jugent mieux et connaissent mieux ceux qui peuvent leur servir d’intermédiaires dans l’ordre de faits qu’ils croient utiles de nous révéler.
C’est ainsi que ces êtres plus avancés découvrent souvent chez celui qu’ils adoptent pour leur élu, des dispositions qu’il ne se connaissait pas lui-même. Ils le développent dans ce sens, malgré les obstacles que leur opposent les préjugés du milieu social, ou les préventions de la famille, sachant bien que la nature a préparé le terrain pour recevoir la semence qu’ils veulent répandre.
Voici un médecin demeuré médiocre parce que des considérations plus fortes que sa volonté lui ont imposé une vocation factice : l’inspiration ne fera jamais de lui un révélateur en médecine. L’Esprit ne viendra jamais lui communiquer les choses qui ont trait au métier qu’on l’a contraint d’exercer, mais bien celles qui sont en rapport avec les facultés naturelles qui, à son arrivée sur la terre, lui ont été départies pour qu’il les développât par le travail, et qui sont demeurées à l’état latent. C’était là l’œuvre qu’il devait réaliser. L’Esprit l’a remis dans la voie, et lui a fait comprendre sa véritable mission.
Le magnétisme, en tant qu’inspiration, ne peut rien pour cette créature fatalement dévoyée. Seulement, comme il y a désaccord entre les tendances que lui impriment ses fluides et les fonctions que les circonstances l’ont condamné à exercer, il est mécontent, malheureux ; il souffre, et, à ce point de vue, le magnétisme peut venir calmer un moment les regrets qu’il éprouve en présence de son avenir brisé.
C’est donc bien à tort que l’on croit généralement dans le monde que, pour être inspiré, il faut être magnétisé. Encore une fois, le magnétisme ne donne pas l’inspiration ; il fait circuler le fluide et nous remet en équilibre, voilà tout. De plus, il est incontestable qu’il développe le pouvoir de concentration.
Les somnambules du plus haut titre, ceux qui répandent autour d’eux des lumières nouvelles, sont en même temps des inspirés ; seulement il ne faut pas croire qu’ils le sont également à toutes les heures.
3° Les somnambules sont plus généralement des fluidiques que des inspirés ; alors on conçoit l’opportunité de l’action magnétique. L’attouchement, soit du magnétiseur, soit d’une chose qui lui a appartenu, peut leur donner ce pouvoir de concentration provoquée et préalablement augmentée par les passes magnétiques. Joint à la prédisposition somnambulique, le magnétisme développe la seconde vue et produit des résultats extraordinaires, surtout au point de vue des consultations médicales.
Le somnambule est tellement concentré par le désir de guérir la personne dont le fluide est en rapport avec le sien, qu’il lit dans son être intérieur.
S’il ajoute à cette disposition celle d’être inspiré, chose extrêmement rare, c’est alors qu’il devient complet. Il voit le mal ; on vient lui indiquer le remède !
Les Esprits qui viennent imprégner l’inspiré ne sont pas des êtres surnaturels. Ils ont vécu dans notre monde ; ils vivent dans un autre, voilà tout. Peu importe la forme physique qu’ils revêtent ; leur âme, leur souffle est identique au nôtre, parce que la loi qui régit l’univers est une et immuable.
Le fluide étant le principe de vie, l’animation, et notre âme ayant, grâce à des fluides différents, des attractions et par suite des destinées multiples et diverses, si, par l’action magnétique, on détourne de sa spontanéité le pouvoir de concentration sur la pensée qui doit nous être transmise, l’Esprit ne peut plus exercer son action, conserver sur nous sa même force, sa volonté intacte pour nous faire écrire, ou lire à haute voix, au monde qui en a besoin, ce qu’il est venu nous apporter.
Les somnambules, pas plus que les inspirés ou les fluidiques, ne peuvent agir sur tous leurs frères incarnés. Chacun n’est puissant que sur un petit nombre. Mais tous, en somme, y trouveront leur part, lorsqu’on n’aura plus frayeur de ces forces généreuses qui se dégagent de nous à des degrés plus ou moins intenses.
Pour les somnambules fluidiques, l’emploi du magnétisme est utile en exerçant sur eux son influence de concentration. Seulement il y a dans cet état plus encore que dans tout autre, une force d’attraction ou de répulsion contre laquelle il ne faut jamais lutter.
Les plus richement doués sont accessibles à des antipathies trop extrêmes pour qu’ils puissent les étouffer. Ils en éprouvent comme ils en inspirent. Leurs prescriptions sont alors rarement bonnes. Mais, doués ordinairement d’une grande force morale en même temps que d’une excessive bienveillance, ils acquièrent un grand pouvoir de modération sur leur personne, et s’il ne leur est pas toujours permis de faire le bien, du moins ils ne feront jamais le mal.
Il existe donc dans le somnambulisme trois degrés bien distincts.
D’abord se présente le somnambule naturel, qui peut rester sans aucune action sur personne, bien qu’il y soit prédisposé par la nature de son fluide.
Vient ensuite le somnambule inspiré, qui ne prend rien en lui-même, mais qui est en quelque sorte le récipient où se déversent les pensées des autres. Le magnétisme, entendons-le bien, ne lui donne pas l’inspiration. Seulement si, après l’avoir subie, il tombe dans un état de prostration qui ne lui permet pas de l’émettre au dehors, le magnétisme peut, en rétablissant la circulation fluidique, lui rendre l’équilibre détruit et le remettre en possession de lui-même.
Puis enfin il y a le somnambule fluidique, de qui la puissance curative se dégage spontanément, et qui peut, comme nous l’avons dit, être conduit à l’inspiration par l’emploi du magnétisme. Alors, c’est l’être arrivé au complet développement de ses facultés.

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