Les portes de l'au-delà

Je ne suis pas là pour vous le faire croire mais pour vous le dire


La lutte contre les préjugés

La lutte contre le préjugé présente tous les caractères d’une guerre où la diplomatie doit souvent faire place à la violence, mais où les passions s’exercent avec le plus de force. J’ai nommé ces fleurs de mal qui sont l’orgueil, l’égoïsme, l’envie et tous leurs succédanés qui s’hybrident sur leur souche empoisonnée.

Dans la vie habituelle, il y a comme une tendance, un entraînement à ce qu’On accepte ce qu’On est convenu de faire, ce que chacun fait, et l’on éprouve comme une gêne et une résistance, on se sent pris comme d’un sentiment de raillerie, de dédain et de méfiance quand il faut accepter, que dis-je ? Quand il faut simplement observer et étudier ce qui est nouveau. Pourquoi ? Parce que ce nouveau vient à l’encontre de ce qui est établi, enseigné, convenu et parce qu’il semble que nous devions nous imposer un effort pour le raisonner et le discuter. Je me place ici exclusivement sur le terrain de l’intelligence et de la pensée, laissant intentionnellement de côté le préjugé dans le domaine des choses usuelles de la vie courante.

 

Or, dans l’ordre psychologique et moral, combien facilement et jalousement même, l’homme se soumet-il à la tyrannie du préjugé, alors même que sa conviction intime est contraire. Combien de fois, au moment même où il paraît amené à merci, se révolte-t-il sous le fouet de l’orgueil qui le cingle ; et sous un prétexte mal dissimulé de courtoisie, de déférence, déserte-t-il une cause à laquelle il semblait d’abord tout gagné !

 

Combien de fois le scientifique amené de lui-même, par l’observation et le calcul, à reconnaître l’erreur consacrée par la routine, par le préjugé, est repris par cette routine, par ce préjugé sous l’influence de l’orgueil, de l’envie, de la haine peut-être, mais à coup sûr d’un sentiment d’amour-propre froissé (lisez : sot orgueil) ! Au moment où l’aveu sincère va sortir de sa bouche, l’erreur lui arrache encore un cri dans lequel, se mentant à lui-même, il proteste, il nie l’évidence sans s’apercevoir que sa négation est une nouvelle défaite due à sa veulerie et à sa lâcheté.

Nous l’avons déjà dit : on appartient à la société, à une société, à un groupe, et on redoute le ridicule, le qu’en-dira t-on ! On a un personnage à tenir, à conserver, à ménager : on ne peut donc souscrire, même après conviction faite, à ce que le monde du groupe, de la société, le monde intellectuel et scientifique a déclaré ex cathedra, mais sans examen sérieux et approfondi, être un enfantillage, une supercherie, une hallucination, une fraude, une mystification, etc.

Voilà pourtant sur quel tremplin s’établissent ceux qui font bon marché, quand ils ne les anathématisent pas, des découvertes dues à des hommes, à leurs sens étrangers au bâtiment, dans le domaine de l’intelligence et de la pensée !

Et, sous le prétexte de ne pas être ridicules, de ne pas vouloir se ranger dans la catégorie de ceux auxquels on accorde par trop généreusement qualificatifs de sots, de dupes, de mystifiés, d’hallucinés, on repousse la lumière ainsi que les avantages et les consolations que des découvertes nouvelles peuvent nous apporter.

 

Sous le prétexte de ne pas vouloir sacrifier sottement et sans examen aux idées nouvelles dans lesquelles résident le progrès, l’avenir, l’avancement, on n’étudie rien et on sacrifie lâchement à un préjugé que l’on élève à la hauteur d’un dogme intangible, ayant tous les droits de prévaloir parce qu’il a le mérite de l’autorité.

Ces pseudosavants ne nous donnent-ils pas la sensation de l’adolescent qui renierait, sans les connaître, les jeux et les préoccupations de son âge sous le prétexte que ce sont là des espèces nouvelles inconnues de l’enfance ? Ne peut-on pas dire d’eux ce que nous pourrions dire de la jeune femme qui refuserait aux devoirs de la maternité sous le prétexte qu’elle n’a jamais joué qu’avec des poupées ? Nous ririons sans doute, et avec raison de ces prétentions originales, étranges et ridicules, et sous l’influence du préjugé, nous ne ririons pas de ceux qui nient impudemment l’évidence sous le prétexte que cette évidence ne leur a pas été démontrée dans les cours de science et de philosophie ?

Sous le prétexte qu’ils n’ont rien vu, et que cette évidence ne se manifeste pas à réquisition ?

Nous ne ririons pas de ceux qui nient encore après avoir vu, sous le prétexte monstrueux et puéril que cela ne peut pas s’expliquer, que c’est impossible !

 

La bêtise humaine fut autrefois stéréotypée en deux vers restés célèbres. Dans certains milieux, elle n’a pas beaucoup changé de nos jours, et on est fondé à dire encore que : De la Chine au Pérou, de Paris jusqu’à Rome,

 

Le plus sot animal, à mon avis, c’est l’homme ! Or, si on y réfléchit, on arrive à cette découverte étrange que l’homme de notre époque, pour être plus frotté de toutes les sciences philosophiques et naturelles, sciences nouvelles assurément, sauf de rares exceptions, les connaît superficiellement, imparfaitement et ne s’attache qu’à l’application pratique qu’il peut en faire et aux bénéfices qu’il peut en retirer au point de vue matériel. Il oublie, il néglige et relègue au second plan, sans compter, tout ce qui, dans ces découvertes, est du domaine de l’esprit, de la pensée, de l’âme, pour ne retenir que ce qui peut contribuer à augmenter son bien-être matériel, ses satisfactions et ses jouissances charnelles.

N’oublions pas que, suivant le principe immuable et inflexible des affinités, des attirances, de l’action et de la réaction, il est rationnel, rigoureusement vrai, inéluctable même, que l’idée matière n’engendre que la matière à l’exclusion de tout ce qui élève et qui anoblit l’âme. Ici donc le préjugé se présente à nous sous des formes particulièrement perfides et dangereuses et on ne saurait trop le démasquer et faire toucher du doigt le danger qu’il fait courir à ceux qui ne savent lui résister. Oui, et ceci est un principe de haute morale et une loi d’humanité : plus l’homme s’enlise dans la matière et s’en fait l’esclave, et plus il lui est difficile de s’en affranchir et de s’élever. Si la matière le prend, elle ne pourra lui rendre et lui donner que ce qui dépend d’elle, c’est-à-dire : l’illusion, la fragilité, la destruction. Ce n’est donc pas avec ces éléments qu’il pourra grandir, se fortifier, progresser en un mot et accomplir son évolution dans le Bien.

 

Les éléments, les moyens de perfectionnement de la vie matérielle ne nous sont pas donnés pour que nous les employions exclusivement à augmenter nos jouissances matérielles, mais bien plutôt, pour nous permettre de consacrer moins de temps, moins d’efforts à tout ce qui est matériel afin de nous en laisser davantage pour nous adonner aux travaux de l’intelligence et de l’esprit par lesquels nous devons arriver à l’accomplissement de notre destinée.

 

L’homme trop souvent et trop facilement est entraîné à prendre l’effet pour la cause. L’effet a certainement son importance en ce qu’il nous frappe et provoque notre attention et nos études, mais il est dans une relativité telle qu’on est en droit de s’étonner de voir combien il est souvent plus particulièrement en faveur que la cause, le principe.

C’est le contraire qui devrait se produire, mais le préjugé veut qu’on interpose les rôles. La cause, c’est la vertu, alors que l’effet n’est que l’action réflexe, l’apparence, l’illusion, l’instrument, et souvent aussi l’erreur ou la cause de l’erreur.

Or, à ces contradictions de l’esprit humain, à ces contresens nous trouvons avec un peu d’attention, une cause certaine, une cause profonde qui n’apparaît pas à la surface, mais qui est ensevelie dans notre conscience profonde, dans notre personnalité, dans notre moi.

Cette cause a un principe initial commun à tons les hommes, mais elle s’impressionne et s’affecte de contingences particulières à chaque individu lesquelles sont tirées des circonstances, des milieux dans lesquels l’homme est appelé à vivre, comme aussi du caractère, du tempérament et de l’éducation qui lui sont propres et qui s’attachent à sa personnalité.

 

L’inégalité des conditions physiques et morales dans lesquelles l’homme est placé, du jour de sa naissance à celui de sa mort, doit nous conduire sur la voie où nous devons rencontrer l’origine première de cette cause. Le mystère qui semble les cacher ne les dissimule pas assez pour les rendre impénétrables, ainsi qu’une certaine philosophie a bien voulu le prétendre et l’enseigner ; et le même argument, le même raisonnement qui nous amènera à nous convaincre de l’utilité, je dirai plus, de la nécessité de l’inégalité des conditions de l’homme sur cette terre, nous révélera aussi comme conséquence, et comme corollaire, le secret des moyens qui nous ont été impartis par la loi divine d’imminence et de justice, de l’envisager sous son véritable aspect. La spiritualité a longuement fait la lumière sur ce point important qui est lié intimement à notre destinée. Nous n’avons qu’à en suivre les enseignements.

 

” tu supposes des défauts chez les autres, tu es bien imparfait, si tu n’en penses point, mais que tu les remarques dans quelques paroles ou actions, tu n’es point parfait, mais si ton esprit reste calme devant tout le mal qui se commet autour de toi, tu es sur le chemin de la vérité. Enfin, si le bien, le beau, le vrai qui existent dans toutes les créatures te ravissent, alors tu as des droits acquis à la sagesse. Elle sera épanouie lorsque tu te surprendras à te tromper souvent et que tu en seras ni inquiet, ni surpris, tu seras en paix et la répandras autour de toi.”

 

Photo de Leah Kelley sur Pexels.com


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